METHODOLOGIE DU COMMENTAIRE DE TEXTE EN FRANCAIS |
Texte: Une main de lumière, Nocturnes, 1960
Après tambacounda et Gorée, voici que nous accueille Saint-Louis, joyau serti au doigt du Fleuve sénégal, et que ci que retentit des profondeurs une voix :
"Moi le Maître-de-langue, ma tâche est d'éveiller mon peuple aux futurs flamboyants. Ma joie de créer des images pour le nourrir, ô lumières rythmées de la parole !"
PREPARATION DU COMMENTAIRE
Première lecture : à la découverte du texte :
Une lecture silencieuse, qui, part du paratexte et met en lumière les dominantes formelles du texte : genre (prose, poèsie / théâtre) et type; titre; information générales sur l'oeuvre intégrale et sur l'auteur, sur les dates et lieu de composition et de publication; sur la typographie, sur la composition. Ces informations indices conduisent à la découverte du sens du texte.
Une lecture décodage éclairant les aspects suivants : la tonalité du texte; les caractéristiques du lexique (connotations, répétitions, récurrences significatives, oppositions); de la suntaxe; les indices de la situation de communication, la formulation de l'idée générale; le répérage des images, des figures de style qui renforcent l'expression des sentiments.
Une lecture interprétation: des hyppthèses et tentatives d'élucidation du sens (immédiat / caché) répérage des pistes d'interprétation.
Vers le Commentaire : au brouillon, avec munitie :
Le choix du type de commentaire (suivi ou composé, ce qui déterminera l'organisation et la présentation de votre travail)
La recherche mouvement, élaboration du plan : linéaire ou composé (nombre de parties ou de centres d'intérêt et leurs sous-parties.)
Eléments de l'introduction et de la conclusion
REDACTION DU COMMENTAIRE
Rédaction au brouillon de l'introduction, puis de la conclusion;
Recopier l'introduction sur la copie (on aura pris soins d'inscrire son nom, le sujet choisi, le type d'exercice, respect d'une marge)
Rédaction directe et progressive du commentaire, à l'aide du plan détaillé, le texte étant toujours bien en regard.
La conclusion est recopiée.
Les dix à quinze minutes sont consacrées à la relecture et à la correction.
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CHANTS POUR SIGNARE
(pour flûtes)
Une main de lumière a caressé mes paupières de nuit
Et ton sourire s'est levé sur les brouillards qui flottaient
monotone sur mon Congo
Mon coeur a fait écho au chant virginal des oiseaux d'aurore
Tel mon sang qui rythmait jadis le chant blanc de la séve
dans les branches de mes bras
Voici que la fleur de brousse et l'étoile dans mes cheveux et le
bandeau qui ceint le front du pâtre-athlète.
J'emprunterai la flûte qui rythme la paix des troupeaux
Et tout le jour, assis à l'ombre de tes cils prés de la Fontaine
Fimla
Fidèle, je paîtrai les les mugissements blonds de tes troupeaux.
Ca r ce matin une main de lumière a caressé mes paupières
de nuit
Et tout le long du jour, mon coeur a fait écho au chant virginal des oiseaux
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Multiples sont le fonctions du poète : mage; prophète, éveilleur de consciences, il est celui dont la plume, sous l'inspiration des Dieux peut rendre immortels un paysage, un nom de femme, un pays.
Léopold Sédar Senghor est, de tous les fils de la vieille Afrique, l'un de ceux qui ont tenté de définir et de vivre la mission qui lui est assignée. Nombreux sont les textes critiques dans lesquels il a exposé cette conception. Mais puisqu'il s'agit de texte dans le contexte plus strict d'une épreuve de français, il nous paraît plus instructif d'essayer de cerner l'illustration qu'il en donne dans l'un de ses poèmes.
C'est le premier Chant Nocturnes qu'il nous a plu d'élire.
"Une main de lumière", tel est le titre que ce texte emprunte à son premier verset. il en compte dix, dont le mouvement souple épouse celui de la promenade que le Pâtre-Poète entame à la naissance du jour :
Les deux premiers versets annoncent le réveil du poéte. Celui-ci se lance alors, versets 3 à 8, dans une promenade qui se déroule en trois temps :
Versets 3-4 : les battements du coeur du poète rythment sa communion avec ses frères les oiseaux;
Versets 5-8: empruntant à la végétation et aux astres son habit de circonstance, le poète ,{Pâtre-Athlète } embrasse tout l'espace, amoureux fervent et attentif;
Les deux derniers versets, 9 et 10 qu' annoncent les conjonctions Car et Et, renferment le poème dans une circularité symbolisant un équilibre où l'oméga rejoint son alpha.
On notera par ailleurs que les versets de ce texte peuvent être associes deux à deux.
Le moment choisi par Léopold Sédar SENGHOR est privilégié par les poètes et les pâtres : il connote la fraîcheur. La naissance imminente du jour suscite une sorte d' allégresse contagieuse qui éradie la nature, empreignant tout le texte.On pense alors à la ferveur de RIMBAUD qui, dans une randonnée immémoriale, embrassa "l'aube d'été". Et aussi la romancière Collette, complice de cette nature, et aimant à la surprendre à l' heure delicate ou les ombres de la nuit fuient en trainant leur voiles... C' est cet instant de communion que que le poète SENGHOR a voulu immortaliser.
Nous ne sommes pas en Europe; mais plutôt dans la brousse. Chantre de l'Afrique, de la Race et de la Femme noire, Senghor les fusionne ici en seul être symbolique, destinataire de son poème, qu'il tutoie, et dont la présence dans le texte revêt la forme de la métaphore filée. La femme est d'abord incarnation de la féminité, par l'évocation de [sa] main de lumière, de [son] sourire, soleil sur "les brouillards qui flottaient monotones". La lente et majestueuse progression de ce lever du jour est suggérée par l'amplification du rythme des deux premiers versets unis par l'enjambement et la mise en relief de la conjonction ET au début du verset 2. L'absence de ponctuation n'enlève rien à l'effet de détachement de l'épitjète "monotone" dont les sonorités prolongent les assonances des mots "paupières", "flottaient" "Congo".
Si la femme semble assimilée a l'Astre du jour, le poète n'en a pas moins d'importance, qui s'identifie au grand fleuve Congo.
Les dernières traces de la nuit estompées libérent alors le poète et les éléments de la nature que sont les oiseaux qui entourent le chant de la fraternité. La pureté du jour et de ce chant, à l'image du coeur du Poète, annoncent le triomphe de la lumière que proclame, dans versets 3 et 4, le champ lexical de la blancheur : virginal, blanc, sève. Senghor chante la vie. celle-ci est avant tout rythme : un rythme intérieur, celui des trépidations du coeur de l'Athlète, qui irradie tout le corps, jusqu'aux "branches de [ses] bras" La vie est ivresse, "chant blanc de la sève" qui enivre le poète inspiré des Dieux. Et le verset de charrier assonances allitérations.
Mais, "Voici" le Poète parcourant la brousse, tel l'Elu qui prend possesion de son territoire : couronné par la fleur qui est couleur de sang et promesse de fruit, il porte, comme des insignes royaux "l'étoile dans [ses] cheveux et le bandeau qui ceint le front du pâtre-athlète". Parfaitement en harmonie avec ce qui l'entoure, il avance avec l'assurance d'un conquérant. La répétition de la conjonction "Et" tisse une sorte de toile entre tous ces éléments au milieu desquels se met le poète. Pâtre, le poète fait sienne cette vie bucolique, investi qu'il se sent de la mission de protéger son troupeau, de préserver hommes et bêtes
.